Depuis quelques jours, la classe médiatique ne cesse de relayer les récents propos de Jean-Marie Le Pen. Pour la plupart des analystes, le président d’honneur du Front national a dérapé lors de son interview au Times en critiquant vigoureusement la nouvelle ligne politique du parti. Mais en réalité, cette sortie médiatique n’est-elle pas une aubaine pour le parti d’extrême-droite qui depuis des mois ne cesse de se contorsionner pour reconstruire son image ? N’assisterait-on pas ici à un dérapage totalement contrôlé ? En effet, par ses propos, Jean-Marie Le Pen consolide la « dédiabolisation » du FN tout en assurant, par son intermédiaire, une représentation à la tête du parti aux militants et électeurs les plus durs.
1er mai 2012, à Paris (F.MORI/SIPA).
Concilier conquête d’un nouvel électorat et sauvegarde d’un électorat ancien
Depuis son arrivée à la tête du parti, Marine Le Pen a décidé de reconstruire l’image du Front national afin de lui permettre de séduire un électorat plus large. Cette tentative de dédiabolisation passe notamment par l’exclusion des militants les plus extrêmes (tout du moins ceux dont la faute a été de dire tout haut ce que beaucoup pensent malheureusement tout bas). Cependant la nouvelle présidente se heurte, au sein même de son parti, à l’opposition de certains militants qui jugent que ce changement radical de tactique risque à terme de dénaturer le message du Front national.
Afin de concilier la conquête d’un nouvel électorat avec la sauvegarde d’un électorat plus ancien, la famille Le Pen organise le parti autour de ses deux leaders. D’un coté la fille, à la tête du parti, donne une image policée du FN afin de séduire un électorat qui auparavant n’aurait pas osé donner sa confiance à l’extrême-droite. De l’autre le père, président d’honneur, s’assure par ses sorties médiatiques (toujours plus polémiques les unes que les autres) le soutien des militants les plus extrêmes qui pour certains lui vouent un véritable culte.
Une tactique bien rodée
Non, les récents propos de Jean-Marie Le Pen ne vont pas créer un cataclysme au sein du Front national. Toute cette histoire est orchestrée de main de fer par la direction du parti, peut-être même a-t-elle été façonnée au cours d’un diner familial au château de Montretout. Ce n’est pas la première sortie de ce genre par ailleurs, la famille Le Pen semble aujourd’hui bien rodée pour monter ce type de bluff médiatique. Pendant que Marine Le Pen endort son monde sur les plateaux télé (avec l’aide parfois de journalistes complaisants) son père, coutumier du fait, enchaine les dérapages à relent antisémites ou islamophobes. Tout le monde a en tête ses propos sur la tuerie d’Oslo ou sa citation en plein meeting du collaborateur et antisémite Brasillach.
Interpellée sur les sorties verbales de son père, Marine Le Pen adopte toujours la même posture, celle de la victime. Soit en se muant dans le silence, soit en refusant de répondre, soit en hurlant au complot médiatique contre le FN. Cependant ce type de dérapage est toujours pour elle une opportunité de répéter que sa présidence est synonyme de changement pour le Front national. Ainsi, pendant que son père, qui n’a rien à perdre, prend tous les coups, elle se pose en victime soit de son hérédité soit des médias. A aucun moment sa responsabilité n’est mise en cause. Elle feint de prendre ses distances avec son père sans jamais condamner ses propos et en le maintenant comme président d’honneur. Cette stratégie de l’hydre à deux têtes permet à Marine Le Pen d’accréditer la thèse du lifting au sein du FN. En réalité, lorsque le masque de la dédiabolisation tombe on se rend très facilement compte que le père et la fille forment en réalité les deux faces d’une même pièce, celle du Front national.
Un relais médiatique assuré
Depuis l’arrivée de Marien Le Pen à la tête du parti, le Front national peut compter sur les médias pour relayer son discours. Des médias naïfs, parfois complaisants qui ne poussent que très rarement la nouvelle présidente dans ses retranchements. S’ils n’hésitent pas à attaquer l’ancien président à chacun de ses dérapages, ils offrent sans arrêt à sa fille le bénéfice du doute, alimentant ainsi sa posture de victime. L’analyse journalistique des récents propos de Jean-Marie Le Pen en est une nouvelle fois la preuve. Absent sur le terrain, le Front national peut compter sur une classe médiatique totalement manipulable pour diffuser son discours, accréditer ses thèses et ainsi lui permettre de franchir la porte de tous les foyers de l’hexagone.
Les médias aiment brasser du vent, faire d’un épiphénomène un cataclysme. Sans esprit critique et sans recul, ils répètent tous les mêmes incantations et finissent par s’en persuader. Mais ne nous laissons pas berner par la famille Le Pen : non, le Front national n’a pas changé, non la génération mariniste n’est pas davantage conciliable avec la République que celle de son père.
« Un relai », « sans recule », et vous êtes professeur ?!? Quelle honte, quelle misère de ne même pas connaître sa langue et de prétendre enseigner quelque chose à la jeune génération.
J’ai un peu de peine à avaliser cette analyse complotiste. Elle néglige qu’avec cette histoire, le FN apparaît comme un parti divisé, ce qui est très mauvais pour son image : le combat des chefs a coûté cher à l’UMP, même s’il n’explique pas tout. Ce même article fait référence à un autre du même auteur, prévoyant un échec pour le FN à Hénin-Beaumont. Ce n’est pas un exemple d’analyse pertinente…